Voici l’homélie de notre évêque prononcée le mardi Saint ; chaque fidèle du diocèse se sentira concerné, notamment par la quête de réponses à la tâche toujours plus importante de nos prêtres, ce malgré une importante aide extérieure (nous sommes bien placés à St Stanislas pour le savoir).
Dieu Tout-Puissant, puisque tu nous as consacrés en ton Fils par le Saint-Esprit, fais que nous soyons pour le monde des témoins d’un Evangile de Salut. C’est la prière qui a ouvert notre célébration. Lors de notre baptême et de notre confirmation, nous avons été consacrés en Jésus-Christ par le Saint Esprit pour être dans le monde des témoins de l’Evangile. Cette consécration s’est faite avec le signe de l’huile des catéchumènes et du Saint Chrême, lequel a été aussi utilisé pour la consécration particulière de ceux d’entre nous qui ont été appelés au ministère de prêtre ou d’évêque. Et lorsque nos corps sont affaiblis par la souffrance, la maladie ou la vieillesse, nous pouvons être réconfortés par le sacrement donné avec le signe de l’huile, le sacrement de l’onction des malades.
C’est à l’évêque seul qu’est réservée la bénédiction de l’huile des catéchumènes, du Saint Chrême et de l’huile des malades. Ce sont ces saintes huiles-là, et pas d’autres, qui seront utilisées jusqu’à la messe chrismale de l’an prochain, dans tout le diocèse, dans des situations très variées, pour la célébration de tous les baptêmes, de toutes les confirmations, de toutes les onctions des malades et de l’ordination des prêtres. Les Saintes Huiles sont donc aussi un signe de l’unité, de la communion entre tous les catholiques du diocèse. C’est pour cela que notre célébration est aussi un rappel de cette communion que nous sommes appelés à vivre dans la diversité par le partage, la solidarité, le soutien et l’enrichissement mutuels entre nous tous pour annoncerla Bonne Nouvelle.
Nous savons comme c’est souvent difficile pour bien des raisons : la configuration géographique de notre diocèse, le niveau social élevé d’une forte proportion de la population et la concentration des plus pauvres dans sept communes des Hauts-de-Seine, la jeunesse de notre diocèse qui n’a pas cinquante ans, etc. Ces obstacles à une communion pleinement vécue peuvent venir aussi de nous et de nos communautés : quand nous sommes individuellement ou collectivement riches de la spiritualité d’un mouvement, d’une communauté ou que pastoralement ou financièrement, nous disposons de beaucoup de moyens, nous risquons de ne pas être conscients que le reste du diocèse a besoin de nous et que nous avons besoin de lui.
Mais ne considérons pas seulement les difficultés ou les obstacles. Regardons aussi avec reconnaissance tout ce qui se vit et qui manifeste que l’unité dans la diversité s’affermit dans notre diocèse. Il me faudrait beaucoup de temps pour parler de tous ceux et celles qui, par la foi, sont des instruments, des bénéficiaires et des acteurs de cette communion que le Saint Esprit crée entre nous tous : les diacres et les personnes engagées dans la vie religieuse ou dans d’autres formes d’engagement pour vivre la consécration de leur baptême et de leur confirmation, les milliers de laïcs, hommes et femmes, qui dans ce diocèse sont actifs pour l’annonce de l’Evangile, la célébration du Salut et le service des autres dans la société et dans l’Eglise. Et je n’oublie pas nos malades et personnes âgées qui, par leur prière et l’offrande de leur vie, contribuent pour leur part à la fécondité de la mission de l’Eglise.
Mais il n’y a pas de doute pour moi, je l’ai déjà dit à plusieurs reprises : ce sont les prêtres en communion avec moi qui sont les premiers acteurs de l’unité du diocèse. Ils le sont de par leur ministère. Ils ont été consacrés par le Saint Esprit et ont reçu l’onction du Saint Chrême pour être signes et instruments de Jésus, Bon Pasteur, qui rassemble son peuple. Ils le sont de par leur ministère, oui, mais aussi de par leur disponibilité. Prêtres dans des lieux différents au cours de leur vie, ils connaissent des communautés différentes, tout en annonçant toujours le même Evangile, célébrant les mêmes sacrements avec les mêmes saintes huiles et en étant en communion entre eux pour former un seul presbyterium et en communion avec le successeur des Apôtres, l’évêque du diocèse, dont ils sont les premiers collaborateurs. Pour cette disponibilité, pour votre dévouement dans cette collaboration, je vous exprime, chers prêtres, ma gratitude personnelle et celle de tous les fidèles du diocèse qui savent et sauront, j’espère, vous la manifester souvent, en particulier en ce Jeudi Saint prochain.
Vous travaillez beaucoup et vous ne suffisez pas àla tâche. Je suis reconnaissant à ceux qui, arrivant d’autres diocèses et d’autres pays, sont venus renforcer notre presbyterium ces dernières années. Je remercie les prêtres étrangers de passage pour des études qui nous rendent des services pastoraux. Je redis aussi ma grande reconnaissance aux prêtres des communautés religieuses et des communautés nouvelles en charge de paroisses chez nous. Tout cela constitue un fort soutien. Pour autant, je ne peux plus faire face à toutes les attentes, à tous les besoins, à toutes les demandes. Depuis deux ans, j’ai consulté, j’ai demandé des avis, des propositions concrètes. Nous n’avons pas avancé. J’ai dit à plusieurs reprises que je considère comme une illusion, une insuffisance et même une fuite de nos responsabilités que d’aller toujours demander de l’aide à l’extérieur du diocèse. J’aimerais que nous cherchions d’autres voies et que nous les cherchions chez nous et ensemble.
Ce n’est pas que je considère l’avenir et la mission dans le diocèse uniquement à partir des prêtres dont le ministère est pourtant indispensable. C’est peut-être le contraire ; c’est parce que je crois qu’il y a maintenant chez nous des diacres et beaucoup de laïcs actifs qui, certes, ne sont pas assez nombreux parmi les baptisés, mais qui sont assez formés et assez responsables pour que les communautés soient vivantes avec moins de prêtres, et en restant dans l’espérance d’en avoir davantage un jour. En Amérique Latine et en Afrique, des communautés voient moins souvent leurs prêtres, en tout cas pas chaque semaine. Ce n’est pas l’idéal, mais ce sont des communautés vivantes. Nous n’avons pas la même histoire qu’elles et nos fidèles ne parcourent pas des kilomètres pour participer à la messe dominicale ou pour suivre le catéchuménat ou les Cours Alpha. Je pense donc que nous pouvons plus facilement que ces communautés adapter nos moyens à notre situation.
Mais il ne faut pas seulement modifier un fonctionnement ou chercher de nouvelles formes de présence des prêtres. Nos dispositions intérieures, notre attitude spirituelle sont premières. Voici pour nous, prêtres et évêque, une occasion unique : en renouvelant dans quelques instants les promesses de notre ordination, nous pourrons redire au Christ lui-même notre disponibilité pour la mission de l’Eglise et très précisément dans la situation de notre diocèse aujourd’hui.
Je vous écrirai plus longuement pour vous donner des précisions dans quelques jours. Nous aurons à préparer et décider ensemble quelques initiatives nouvelles significatives concernant la présence et le ministère des prêtres. Tous les prêtres devraient en être solidaires pour que ce qui serait vécu par quelques-uns soit reconnu et soutenu par tous. Evidemment, j’associerai à cette démarche, le moment venu, les diacres et les laïcs en responsabilité, y compris les membres des EAP et, d’une manière à trouver, tout le diocèse.
Dans quel but, dans quel esprit tout cela ? Vous le savez bien : pour que tous les baptisés vivent du Christ et annoncent l’Evangile et que diacres, prêtres et évêque, nous les aidions par notre ministère.
Demandons au Seigneur les dispositions intérieures nécessaires pour accomplir sa volonté. Ainsi, nous ne passerons pas à côté de l’essentiel.
Chers frères et sœurs, je vous appelle à l’espérance pas seulement pour le diocèse, mais pour vous-mêmes, toute l’Eglise, toute l’humanité et chaque être humain. Je le fais avec quelques-unes des paroles que notre Pape François nous a adressées dans l’homélie de la messe d’inauguration de son nouveau ministère, quand il s’est référé à Abraham qui a espéré contre toute espérance : Aujourd’hui encore, devant tant de traits de ciel gris, nous avons besoin de voir la lumière de l’espérance et de donner nous-mêmes espérance. Garder la création, tout homme et toute femme, avec un regard de tendresse et d’amour, c’est ouvrir l’horizon de l’espérance, c’est ouvrir une trouée de lumière au milieu de tant de nuages, c’est porter la chaleur de l’espérance ! … Espérance … fondée sur le rocher qui est Dieu.
+ Gérard Daucourt
Evêque de Nanterre
26 mars 2013