« Spéculation alimentaire et développement »
Samedi 25 janvier 2013, à la médiathèque de Bagneux, le CCFD nous a invités à une conférence débat avec la participation de François-Xavier de Perthuis de Laillevault et Nesrine Gourine, experts en suivi et évaluation des politiques publiques d’aide au développement.
Après avoir présenté les différentes définitions et mesures de la pauvreté, et leurs limites, les deux experts nous ont décrit la situation du Niger, pays en précarité alimentaire durable où l’agriculture mobilise environ 80% de la population.
Cette agriculture repose sur la monoculture du mil, aliment de base des populations rurales. Avec une population en forte croissance, 17 millions d’habitants contre 11 millions il y a 10 ans, et une grande sécheresse qui perdure, la production locale peine à couvrir les besoins de la population.
La récolte du mil a lieu une fois par an d’octobre à décembre, et elle doit être rigoureusement gérée dans le respect d’une certaine répartition :
- une grande part est réservée pour financer les cérémonies, et rembourser les crédits les plus urgents (paiement des soins, et remboursement des avances sur les futures récoltes).
- une part est vendue sur les marchés céréaliers pour capter un revenu,
- le reste est alloué à la consommation quotidienne mais également à un stock de sécurité.
Ainsi, s’ouvre une période de près de 9 mois sans production au cours de laquelle les prix sont très instables. En effet, au moment de la récolte où l’offre est surabondante, les prix sont bas. Les marchands grossistes vont alors se constituer des stocks qu’ils libéreront progressivement ensuite pour faire monter les prix. Ainsi s’enclenche un mécanisme spéculatif entraînant la précarité des populations rurales.
Quelles sont les stratégies mises œuvre sur place pour limiter cette précarité ?
Les banques céréalières, régies par les coutumes locales, participent à une régulation des cours en achetant la récolte aux paysans avec possibilité pour eux de la racheter pendant la période de soudure à un prix fixé au départ. Toutefois, leur action reste limitée.
Les familles en situation de précarité vendent leurs terres, les mettent en gage, ou migrent vers les villes. Cette migration se révèle être une cause d’accélération de la précarité car l’individu, très souvent sans travail, ne pourra ni se nourrir ni envoyer de l’argent à sa famille.
Ensuite, Paul Mathis décrit les propositions du CCFD :
- accorder une place essentielle à l’agriculture familiale qui doit s’appuyer non seulement sur des facteurs de production et du savoir-faire, mais également sur des étapes de valeur ajoutée comme la conservation, la transformation, la commercialisation.
Le développement passe par l’accès au microcrédit, grâce notamment à des organismes comme la SIDI (Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement) et en s’appuyant sur des associations locales.
- développer le plaidoyer afin que les instances internationales et les Etats adoptent des mesures utiles concernant les règles du commerce et de la finance internationales.
Comment « passer à l’action » pour favoriser ce développement responsable ? Depuis plus de 50 ans, le CCFD se bat contre la faim dans le monde et pour le développement. Actuellement, il soutient 450 projets dans 60 pays. Aidons-le !
Odile etClaude Desplanches