Marie mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans la mangeoire. » Quelle étrange maternité ! Certains d’entre vous peuvent se remémorer la naissance de leur enfant, les contractions, le trajet vers l’hôpital…400000 enfants environ vont naître aujourd’hui dans le monde. Mais le contexte pour chacun sera différent. Naître dans une favela du Brésil, une banlieue de Sydney, à Papeete, à Johannesburg, en Île-de-France… place chacun de nous très loin des uns et des autres. Chaque existence est un cas isolé, sans lien apparent avec les autres. Nous semblons naître bien seuls. Jésus, avec Marie et Joseph, semblent eux aussi bien seuls. Vulnérables. La naissance de leur enfant : une simple statistique, sans conséquence, avec pour accueil l’indifférence généralisée.
L’Unicef estime à 2,2 milliards le nombre d’enfants dans le monde, dont 600 millions vivent dans la pauvreté. 130 millions n’ont pas accès à l’éducation. 250 millions travaillent pour subvenir aux besoins de leur famille. Autant de personnes qui n’ont pas de place dans la « salle commune » du village planétaire. Comme la sainte famille elle-même n’aura pas de place dans la salle commune de Bethleem.
Mais cette solitude, cette précarité, révèlent la force du geste de Marie, qui emmaillote et couche le nouveau-né. Seule avec Joseph, elle pose ce geste qui sauve la vie de cet enfant. Elle ressemble à tant de mères courage qui malgré les circonstances difficiles organisent avec les moyens du bord leur existence précaire. Si les ténèbres semblent submerger la Sainte Famille, cet enfant est leur seul souci à cette heure. Cet enfant est la lumière qui luit dans les ténèbres, comme prophétisait Isaïe. Cet enfant, c’est le soleil de Marie, sa joie, sa vie, sa bataille comme chantait Balavoine. Elle ressent en elle ce que Jésus suscite en celui et celle qui l’accueille de tout son cœur. Pour elle et Joseph « se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et sauveur, Jésus-Christ », comme dit saint Paul. Marie, en emmaillotant et en couchant Jésus dans la mangeoire, transforme cette dernière en un ostensoir, où Jésus peut être présenté et rencontré. Noël célèbre ce cadeau de Dieu pour nous. Ce geste d’emmailloter et de coucher l’enfant est une offrande faite par Marie. Car le plus grand cadeau pour les chrétiens est de rencontrer, connaître et aimer le Seigneur Jésus. S’il n’y a pas eu de place pour lui dans la salle commune, il en a eu dans le cœur de Marie. Et des bergers. Et j’espère, dans le nôtre…
Cette année, submergés parfois par le découragement et la peur, nous nous sommes sentis parfois à l’étroit, avec le sentiment d’être dans une camisole sanitaire. Étouffante parfois. Pendant ce Noël, nous voulons reprendre un peu de souffle et de courage autour de la table de famille. Noël est un rappel que le bonheur tient à peu de choses : un pain donné, un vin partagé, une parole de tendresse. La sagesse de Marie est alors une ressource pour nous. Elle ne cherche pas à régler pas tous les problèmes. Elle fait tout simplement ce qu’elle doit faire : prendre soin du petit trésor qu’elle a mis au monde. Noël c’est remettre Jésus au centre de nos vies, écouter sa parole d’Évangile, pour soigner sa vie chrétienne, nourrir sa charité. Notre salle commune, c’est l’Église dans laquelle nous devrions tous nous sentir les bienvenus et aimés. En ce Noël accueillons l’enfant Dieu ! Souhaitons à nos voisins, à deux chaises de distances, connus et inconnus, un joyeux Noël ! Les mots du psaume 95 met des mots sur notre joie :
« Chantez au Seigneur un chant nouveau,
Chantez au Seigneur, terre entière,
chantez au Seigneur et bénissez son nom ! »
Michel Protain