C’est la fête, c’est la fête !
En ces temps de morosité, d’échos de guerre, de souffrances dans les corps, au travail… est-il de bon ton de faire la fête ?
Dans l’Ancien Testament, le cœur n’était pas toujours à la fête : « Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, nous souvenant de Sion ; aux saules des alentours nous avions pendu nos harpes » (Psaume 136). Pour l’auteur du livre des Proverbes (21,17), la fête est une perte de temps et d’argent : « Qui aime faire la fête sera sans le sou, qui aime le vin et les parfums ne fera pas fortune ». Ben Sira le sage nous prévient que les fêtards ne forment pas toujours les meilleurs amis : « Si l’ami n’est qu’un compagnon de plaisir, au temps de la fête, que vienne la détresse, il changera de camp. » (Si 37, 4).
Certes, certes… les raisons pour ne pas faire la fête sont nombreuses. Mais la Bible aime s’accrocher à cette idée de faire la fête. Pour elle, la sagesse consiste à discerner ce qui est approprié (ou non) pour telle circonstance : il y a « un temps pour pleurer, et un temps pour rire ; un temps pour gémir, et un temps pour danser » (Ecclésiaste 3, 4). Dans la Bible, les fêtes sont partout. Elles sont même commandements du Seigneur : « Tu célébreras la fête des Semaines, des premiers fruits, de la moisson des blés, et aussi la fête de la Récolte, en fin de l’année » (Exode 34, 22).Ceux qui reviennent de l’Exil entendent le prophète annoncer : « Tous les survivants des nations (…) monteront année après année se prosterner devant le Roi Seigneur de l’univers, et célébrer la fête des Tentes. » (Zacharie 14, 16) La fête succède aux heures d’épreuve du peuple et offre un lieu de ressourcement. Comme une oasis dans un désert. Enfin, la fête est aussi intérieure et personnelle à chacun : « Mon cœur exulte, mon âme est en fête, ma chair elle-même repose en confiance » (Psaume 15).
Avec le Nouveau Testament, c’est Jésus-Christ qui transforme notre manière d’envisager la fête. Quand Saint Jean évoque les fêtes juives, c’est d’abord pour montrer Jésus se mêlant aux foules à l’occasion de celles-ci. Sa présence alors transfigure et donne un sens nouveau à la fête : « On était déjà au milieu de la semaine de la fête quand Jésus monta au Temple; et là il enseignait. » (Jean 7, 14).
Jésus transforme l’existence de celui et celle qui le trouve au milieu de la foule, et qui en réponse « exalte le Seigneur, exulte en Dieu son sauveur » (Jean 1, 46). Marie est ainsi celle qui nous invite à la fête dans son Magnificat. Durant les noces de Cana, c’est elle qui indique aux serviteurs que c’est à Jésus de relancer la fête : « Tout ce qu’il vous dira, Faites-le ! » (Jean 2, 5).
Le 23 juin, nous fêterons les 90 ans de la pose de la première pierre de notre église, mais aussi 20 ans de présence Spiritaine dans la paroisse. Sachons fêter ce que nous avons reçu. Nous pourrons certes toujours pleurer nos misères et nos manques. Mais pour le moment, le temps est venu : que la fête commence !
P. Michel Protain