« Afin que tu puisses raconter à ton fils et au fils de ton fils » (Ex. 10, 2). La vie se fait Histoire.
Le Pape François consacre le message de cette année au thème de la narration, parce que nous avons besoin de respirer la vérité des bons récits : des récits qui construisent, et non qui détruisent; des récits qui aident à retrouver des racines et la force d’aller de l’avant ensemble. Il juge que nous avons besoin d’un récit humain, qui parle de nous et de la beauté qui nous habite. Un récit qui sache regarder le monde et les événements avec tendresse ; qui raconte que nous faisons partie d’un tissu vivant ; qui révèle l’entrelacement des fils par lesquels nous sommes rattachés les uns aux autres.
- Tisser des récits
L’homme est un être narrateur. Il décide souvent ce qui est bien ou mal en fonction des personnages et des récits qu’il a assimilés. Les récits le marquent, façonnent ses convictions et ses comportements, ils peuvent l’aider à comprendre et à dire qui il est.
L’homme est le seul qui ait besoin de se raconter, de “se revêtir” d’histoires pour protéger sa vie. la structure des récits prévoit des “héros”, qui, pour poursuivre un rêve, affrontent des situations difficiles, combattent le mal, stimulés par une force qui les rend courageux, celle de l’amour.
Mais, depuis les origines, notre récit est menacé : le mal s’insinue dans l’histoire.
- Tous les récits ne sont pas bons
« Si vous mangez, vous deviendrez comme Dieu » (cf. Gn 3, 4) : la tentation du serpent insère dans la trame du récit un nœud difficile à défaire. « Si tu possèdes, tu deviendras, tu atteindras… », Combien de récits nous intoxiquent, en nous persuadant que, pour être heureux, nous aurions constamment besoin d’avoir, de posséder, de consommer. Souvent sur les toiles de la communication, , des récits destructeurs et offensants sont élaborés, détruisant et brisant les fils fragiles de la cohabitation.
Cependant, tandis que les récits instrumentalisés ont la vie courte, un bon récit. Des siècles plus tard, il reste pertinent,
- Le Récit des récits
L’Écriture Sainte est le Récit des récits. Elle nous montre dès le début un Dieu qui est créateur et en même temps narrateur. A travers sa narration, Dieu appelle les choses à la vie et, au sommet, il crée l’homme et la femme comme ses interlocuteurs libres, générateurs de récits avec lui. La vie nous a été donnée comme une invitation à continuer à tisser cette “étonnante merveille” que nous sommes.
Ainsi l’homme sera appelé, de génération en génération, à raconter et à fixer dans la mémoire les épisodes les plus significatifs de ce Récit des récits, ceux qui sont capables de communiquer le sens de ce qui s’est advenu.
L’expérience de l’Exode où l’on voit Dieu intervenir dans l’histoire de son peuple nous enseigne que la connaissance de Dieu se transmet avant tout en racontant, de génération en génération, comment il continue à être présent. Le Dieu de la vie se communique en racontant la vie.
Jésus lui-même parlait de Dieu avec des paraboles, des récits courts, tirés de la vie quotidienne. Ici, la vie devient récit et ensuite, pour l’auditeur, le récit prend vie : cette narration entre dans la vie de celui qui l’écoute et la transforme.
Même les évangiles sont des récits. L’Évangile de Jean nous dit que le Narrateur par excellence – le Verbe, la Parole – s’est fait narration : « Le Fils Unique engendré, lui qui est Dieu, lui qui est dans le sein du Père, c’est lui qui l’a raconté » Dieu s’est personnellement inséré dans notre humanité, nous donnant ainsi une nouvelle façon de tisser nos récits.
- Une histoire qui se renouvelle
L’histoire du Christ n’est pas un patrimoine du passé, c’est notre histoire, toujours actuelle. Elle nous montre que Dieu a pris à cœur l’homme, au point de se faire homme, chair et histoire.. Après que Dieu s’est fait histoire, chaque histoire humaine est, en un certain sens, l’histoire divine.
Chaque histoire humaine a une dignité inviolable. Par conséquent, l’humanité mérite des récits qui soient à sa hauteur,
« De toute évidence – écrit saint Paul – vous êtes cette lettre du Christ, écrite avec l’Esprit du Dieu vivant, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs. ». Par l’œuvre de l’Esprit Saint, chaque histoire, , peut devenir inspirée,. Comme les Confessions d’Augustin.. Ces histoires réclament d’être partagées, racontées, pour les faire vivre en tout temps, avec tout langage, par tous les moyens.
- Une histoire qui nous renouvelle
En lisant l’Écriture, les histoires des saints, ainsi que ces textes qui ont su lire l’âme humaine et mettre en lumière sa beauté, l’Esprit Saint est libre d’écrire dans nos cœurs.
Et raconter à Dieu notre histoire n’est jamais inutile. Se raconter au Seigneur, c’est entrer dans son regard d’amour compatissant envers nous et envers les autres. Pour ce faire, confions-nous à une femme qui a tissé l’humanité de Dieu dans son sein et, comme le dit l’Évangile, elle a tissé avec tout ce qui lui arrivait. La Vierge Marie a, en effet, tout conservé, méditant dans son cœur (cf. Lc 2,19). Demandons-lui de l’aide, elle qui a pu défaire les nœuds de la vie avec la douce force de l’amour.