(RV) L’Evangile de ce troisième dimanche de Carême nous montre Jésus chassant les marchands du Temple. Quelle colère de Jésus ! Il fait un fouet avec des cordes, jette par terre la monnaie des changeurs et renverse leur comptoir. Comment comprendre le comportement de Jésus ? Cela est d’autant plus étrange que ces marchands du Temple sont utiles. Ce sont eux qui fournissent les animaux pour les sacrifices que la Loi de Moïse impose.
Ce sont les paroles mêmes de Jésus qui nous permettent de comprendre son attitude : « Enlevez cela d’ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic » (Jn 2,16). Le Temple est le lieu saint où s’exprime la relation d’Israël avec Dieu. Et ce lieu est devenu un lieu de trafic. Comme souvent dans l’Evangile selon saint Jean, les paroles de Jésus doivent être comprises dans un double sens. Bien sûr, il y a le trafic d’animaux qui fournit les victimes à offrir. Mais le trafic fait aussi allusion à la relation qu’Israël entretient avec Dieu. Le Seigneur s’intéresse au cœur de l’homme. Un sacrifice d’animal n’est pas à même de restaurer la relation avec Dieu. Ce que Dieu demande à l’homme, c’est la conversion du cœur. Le prophète Isaïe dit : « Ce peuple me glorifie de ses lèvres, mais son cœur est loin de moi » (Is 29,13). Tout au long de son passé, Israël est tenté de servir le Dieu Baal. Baal est le dieu de la pluie, cette pluie si nécessaire pour que la récolte soit bonne et que la vie du peuple soit assurée. Le dieu Baal demande des sacrifices d’animaux pour être contenté mais ne s’intéresse pas à la vie de l’homme. C’est ce type de relation que Jésus condamne avec violence aujourd’hui.
C’est le grand mystère de notre foi chrétienne. Le Seigneur s’intéresse à chacun de ses enfants. Il veut son bonheur et c’est pourquoi Jésus prononcera le discours des Béatitudes. Mais ce bonheur s’enracine dans l’attitude profonde de l’homme qui choisit d’accueillir Jésus dans sa vie, d’écouter sa parole et de la mettre en pratique. Quelque part, ce serait plus facile de devoir se soumettre à quelques actes extérieurs pour s’attirer la clémence divine. Mais si nous en restons là, notre soif d’aimer et d’être aimé ne sera jamais satisfaite. Nous sommes faits pour cette relation d’amour avec Dieu, et notre cœur est lent à croire que cela est possible, que le Seigneur nous aime et qu’il attend notre amour en retour. La colère de Jésus s’explique donc facilement si l’on considère, au cours des siècles, l’endurcissement du cœur des hommes qui ne parviennent pas à aimer Dieu comme un père aimant et miséricordieux. Il est alors nécessaire de tout renverser pour partir de nouveau, en prenant un autre chemin.
En voyant Jésus agir ainsi, ses disciples se rappelèrent cette parole de l’Ecriture : « L’amour de ta maison fera mon tourment » (Jn 2,17). L’Evangile de ce jour nous conduit à revisiter notre amour pour l’Eglise. Sommes-nous zélés pour l’Eglise qui a été confiée à Pierre ? Les désaccords, les incompréhensions ne manquent sûrement pas. Nous aimerions une Eglise plus moderne ou plus traditionnelle, plus ouverte ou plus stricte ! Mais avant de vouloir changer l’Eglise, posons-nous cette question : « L’aimons-nous ? ». Si nous ne l’aimons pas, alors nous ne pourrons jamais apporter notre contribution pour qu’elle soit plus belle, plus authentique. En ce jour, demandons à l’Esprit Saint de nous renouveler dans l’amour de l’Eglise.