Croyant « quand même » !
« A tous moments, devant les grandes souffrances, on entend répéter : « Si Dieu existait, cela n’arriverait pas. » En réalité, ce qui importe pour le croyant, ce n’est pas d’être croyant, c’est d’être croyant « quand même », c’est de n’être pas moins blessé que les autres par tout ce qui est révoltant, autant blessé, peut-être encore plus que quiconque, et cependant de porter en soi cette certitude : « l’Eternel est Amour quand même », et « nous sommes aimés quand même ». Cela se perçoit par instant, mais cela reste mystérieux ».
(Abbé Pierre, revue « Autrement » n°11, avril 1993, p.232)
Fête de Pâques, Christ est ressuscité, Alleluia ! Il est vraiment ressuscité, Alleluia ! C’est pourquoi nous sommes croyants « quand même » !
Après le long et laborieux carême, après les hésitations et les incompréhensions du quotidien, avec les souffrances et les ténèbres de la vie, la Bonne Nouvelle éclate : « Christ est vainqueur de la mort, il est ressuscité » ; et « avec Christ ressuscité, nous sommes ressuscités » (Col 2, 12). Ne voyez-vous pas le tombeau vide ? Ne vous rappelez-vous pas et ne comprenez-vous pas la parole de vie de Jésus ? N’entendez-vous pas le Seigneur vous appeler par votre nom ? Et il y a encore beaucoup d’autres signes (Jn 20, 30) …
La foi ne va pas de soi. Bien au contraire, les apôtres eux-mêmes et tous les témoins de la résurrection eurent des doutes et éprouvèrent de grandes difficultés à croire. « Quand ils le virent, quelques uns eurent des doutes » (Mt 28,17). « Les femmes s’enfuirent loin du tombeau et elles ne dirent rien à personne car elles avaient peur » (Mc 16,8). « Les Onze ne croyaient pas les femmes » revenues du tombeau vide (Lc 24,11), « ils restaient encore incrédules » (Lc 24,41) ….
Aujourd’hui encore, nous éprouvons les mêmes difficultés pour croire. Mais la violence des vents contraires est-elle un obstacle pour donner notre adhésion à Dieu (voir la prière de Jésus le Jeudi Saint dans le jardin des Oliviers : « Seigneur, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux » (Lc 22, 42)) ! N’est-elle pas plutôt un moyen pour creuser, fortifier, épurer notre foi, et nous faire donner gratuitement toute notre confiance à ce Dieu tout Amour ?
Permettez moi de vous citer encore des auteurs qui m’aident à dépasser ma non-foi ou ma mal-croyance et m’accompagnent sur mon chemin de conversion.
« Dieu n’est pas venu supprimer la souffrance. Il n’est pas venu l’expliquer. Il est venu la remplir de sa présence » (Paul Claudel).
« Le poids des certitudes finit par étouffer la foi » (Arcabas). « La foi, c’est vingt-quatre heures de doute moins une minute d’espérance » (Bernanos).
« La foi fait dire non pas « je sais » mais « je crois » ; et à travers sa Parole, Dieu ne nous donne pas des preuves, mais il nous fait des signes. C’est pourquoi tous, croyants, athées, agnostiques, nous avons ceci de commun : notre absence de certitudes et la nécessité où nous sommes de parier. Ma foi est interrogation et risque. Face aux interrogations du monde, de la vie, de la mort, de la souffrance, je prends le risque d’une réponse qui est la foi. D’autres prennent le risque d’une réponse qui est l’athéisme. Ce sont deux versants opposés mais frères : croyants, athées et agnostiques, nous sommes tous des frères d’incertitude. Au Golgotha, la certitude, c’était la mort du Christ. La foi, c’est le pari que cet agonisant est quand même le Fils de Dieu » (Noël Copin).
N’est-ce pas cela croire, croire quand même au Ressuscité, au Dieu Tout-Amour ? Bonne fête de Pâques !
Père Jean.